Hollydays est de retour en ce début d’année 2018 et ce n’est pas pour délivrer son nouvel et premier album mais plutôt pour s’affirmer à travers un nouvel EP. Le format de l’EP devenant de plus en plus présent dans le paysage musical français. Ce dernier étant à la fois plus économique et pour la plupart du temps plus qualitatif. Les artistes se concentrant seulement sur un nombre de morceaux réduits pour être plus efficaces mais également plus percutants.
Hollydays est un duo parisien officiant sur la scène de la chanson française / Trip-Hop.
Ils nous présentent donc en ce 12 janvier 2018 leur troisième EP sous la vapeur suave de « L’odeur des joints » successeur du très réussi « Les insatisfaits » sorti en 2015.
La formation parvient à transformer l’essai avec cette nouvelle sortie en apportant de la nouveauté tout en gardant leur grain, leur vision à la fois intimiste et pourtant si universelle.
Le nouvel effort du duo français marque une césure avec leur précédent travail, tout d’abord d’un point de vue visuel en passant d’une précédente pochette d’un noir pétrole à aujourd’hui au travers d’un blanc immaculé, à la manière des cendres du phœnix ne faisant que prendre en ampleur à chaque renaissance et c’est d’ailleurs bien ce que compte nous révéler Hollydays.
De par sa renaissance, Hollydays va apporter une véritable approche dichotomique. A la fois lumineuse de par son visuel mais si asthénique, dépressive de par son ambiance auditive. Ainsi l’Ep dépeint une vie de la jeunesse contemporaine, d’une jeunesse moderne désabusée sans repères se rattachant à la moindre aspérité dans sa chute. De manière pourtant si singulière Hollydays parvient à insuffler un espoir, une lumière qui ne fera jamais sombrer l’œuvre dans un quelconque constat alarmiste mais qui poussera plutôt à tout un chacun de sentir une puissance nous porter pour mieux nous faire renaître. L’image du phoenix se faisant toujours plus forte, les cendres du joint ne sachant être que trop proches.
Le duo ouvre leur travail avec l’étouffant et habile Léo, dévoilé en Novembre. Le morceau nous guide au travers l’exode d’une jeune femme revenue d’Angleterre regrettant l’amour, celui qu’elle avait laissé en partant. Le souvenir d’une liberté et d’une jeunesse révolue. A la force d’un refrain judicieux, empathique, gorgé d’anxiété mais aussi d’espoir, la formation nous saisit. Les paroles sont écrites avec ingénuité. Le duo joue avec les mots comme à son habitude mais donne un aspect encore plus tranchant, acerbe à son contenu.
Néanmoins à travers cette approche éplorée et pessimiste, on peut par le biais du chant de Elise Preys ressentir un autre penchant : celui du temps passé , celui de l’insouciance. Léo est bien plus qu’une chanson sur la perte de l’être aimé, désiré. Elle est celle du constat, celle du regard sur le temps qui passe, celle de la disparition de l’adolescence, de la jeunesse. Elle marque l’arrivée à l’âge adulte, le dit âge de raison, la volonté d’oubli des blessures passées.
Le travail de Sébastien Delage est également à saluer sur ce morceau avec des instrumentales riches et osées. A la manière des autres morceaux de l’EP, toutes les chansons sont écrites sous formes de montée. Néanmoins la particularité du morceau Léo est le parti pris pour les mélodies orientales. On pense alors parfois à Acid Arab et à toute cette scène parisienne, se révélant dans le milieu Electro, au travers d’odyssées racontées au travers du souffle des gammes orientales.
On en viendrait à la sortie de ce premier morceau à tous vouloir rencontrer ce mystérieux Léo. Une chanson qui fera date dans le paysage musical français.
Cependant nous n’en sommes pas à notre première surprise avec la chanson éponyme de l’EP : L’odeur des joints. Cette dernière nous conte les effets de la vie de couple, de la routine par delà le sentiment amoureux. La capacité d’aimer par delà les défauts que l’on peut constater chez l’être aimé. Le constat de ne plus réellement parvenir à savoir ce qui plait chez l’être aimé sans pour autant pouvoir s’en éloigner. Cette manière de marcher sur le fil entre le sacrifice et la rupture.
Un obscur chemin où la lumière parfois trop lointaine n’est qu’une illusion.
On suit ce tracé, ces ressentis portés par cette voix entêtante ainsi qu’une ligne musicale minimaliste ne cessant de prendre son envol jusqu’à occuper la totalité du spectre musical.
Le troisième morceau de l’album est le groovy « On a déjà ». Renforcé par des influences beaucoup plus house, Trip Hop qui rappellent les anciens travaux de la formation.
Il nous mène dans les méandres d’une jeunesse qui a déjà tout, qui a dépassé la perception de première fois. Le morceau est particulièrement prenant et est une bouffée de vitalité avant le très dur « Je bois ».
Cependant malgré une instrumentale très rythmée et enjôleuse, le sous-texte du morceau résonne avec un goût assez âpre face à une génération sans repères, sans but à atteindre.
Enfin le morceau de clôture est une réflexion quant à la dernière fenêtre de sortie du monde réel. Un échappatoire à un quotidien morne et sans saveur. Une porte vers l’impossible.
Le morceau renvoie directement à toutes les fois où face à la perdition du quotidien, l’on ne veut plus qu’une chose vivre le rêve, notre rêve.
Cette dernière respiration est seulement portée par un piano, et la voix de la formation. Retour à une simplicité certaine, une totale mise à nue. Avec ce morceau, Hollydays nous porte sur l’espoir de pouvoir voir le monde sous le prisme de l’ivresse, l’espoir de voir le monde rêvé s’organiser.
Avec ce troisième EP Hollydays enfonce le clou et s’impose comme un duo émergent majeur sur la scène musicale française. Il ne reste plus qu’à laisser le temps travailler, en espérant les voir portés vers les plus hautes sphères.
L’odeur des joints est une apnée nocturne, un voyage tumultueux bercé par la lumière d’un diamant. L’incandescence est proche et la fin du tunnel à portée de bras, il ne s’agit alors que de résister, de tenir assez longtemps. C’est justement avec ce que nous propose Hollydays que nous pourrons y parvenir.