Nous avons eu récemment l’occasion de nous entretenir avec Euryale Djentka, membre du groupe Rãgarãja . Voici l’interview réalisée…..
MusiqueAlliance :Comment est né Rãgarãja ?
Rãgarãja : Après un accident en fait. L’accouchement de ce projet s’est faite dans l’arlésienne d’un autre projet. Je cherchais à relancer mon ancien projet (Dacryma) et lors du tournage d’un clip j’ai fait une très grosse chute en ratant une cascade. J’ai fini au service réanimation, et durant ma convalescence j’ai entériné le projet Dacryma ou je n’étais que guitariste et choriste pour monter un nouveau projet au chant! Je suis resté avec le guitariste et le bassiste de dacryma (Stanislas et Fabien), puis on a cherché d’autres musicos pour rejoindre la machine!
Rãgarãja a toujours existé au fond de moi. Et d’ailleurs je pense qu’il existe en chacun de nous. Ragaraja c’est de la colère, c’est la rage, c’est un chant lyrique avant de partir dans la bataille de la vie! C’est un truc qui est censé te mettre la hargne avant d’aller taffer. C’est un peu comme un remontant. Tout le monde a du courage, on l’a tous en soi, mais faut un déclencheur. C’est comme une arme, à toi d’appuyer sur la gachette et d’appuyer sur la touche “play”.
MusiqueAlliance : Pourquoi avoir choisi ce nom ?
Rãgarãja : C’est le roi des passions chez les hindous. C’est le cri de l’âme qu’on veut mettre en musique. Je voulais m’exprimer comme ça, parce que je suis pas là pour donner des leçons politiques ou pour faire de la chanson engagé comme la plupart des musiciens qui choisissent le français. Je préfère parler passion. Mettre des mots dessus. Des métaphores précises, et texturés. Après si on a choisi ce nom c’est peut-etre que c’est aussi pour se foutre un peu de la gueule des groupes français qui foutent des A partout dans leur nom (Dagoba, Gojira, etc).
Rãgarãja : Profondément génial. (rires) Les musiciens sont pas très doués pour qualifier leur propre musique. Nous on fait du lavage de cerveau pour que les gens affrontent leur monde en étant un peu plus “rageur” et fort. Après si ça peut exciter la curiosité des gens : on mélange un chant crié et rappé en français avec un vocabulaire lyrique, du métal moderne, deathcore et djent, et des touches d’électro. Qui vont surement s’intensifier avec le temps.
MusiqueAlliance : Alors justement pourquoi avoir préféré chanter en français plutôt qu’en Anglais comme malheureusement trop de groupe le font ?
Rãgarãja : Je sais pas si c’est malheureux de chanter en anglais en soi. Je pense que ce qui est malheureux c’est de devoir chanter en anglais pour viser l’international, parce qu’en France plus personne ne croit dans la musique metal en français, professionnel du milieu inclus. Y a une sorte de méfiance immédiate quand tu dis que tu chantes en français, c’est assez dingue. On a déjà reçu des mails de managers ou de bookers qui te disent cash : “ouais moi je suis désolé, mais je préfère privilégier les groupes en anglais, parce qu’on pense que le français ça marche pas”. Moi je pense pas que ça marche pas. Je pense que y a pas assez de groupes qui ont essayé de faire sonner le français en métal. Que la langue anglaise est devenu la norme automatique parce que l’herbe est toujours plus verte ailleurs et que c’est plus facile quand t’as rien à dire, de le hurler dans une langue que personne ne comprends. On a eu quelques groupes très originaux qui ont réussi à poser leur identité en français (Eths, Kells, The Arrs, L’esprit du Clan). Mais c’est trop peu. Pourtant quand on voit Rammstein on sait que l’anglais n’est pas la seule langue possible! A nous de faire le maximum pour faire sonner le français.
Parce que si tu réfléchis bien, quand tu chantes, tu t’adresses à ton public pour lui donner un message, ou une histoire. Mais moi mon public il est pas à Atlanta, à Londres, ou dans le trou du cul de l’écosse. Il est dans l’Ile de France, dans la campagne, dans les bleds paumés, en Belgique, en Suisse, au Québec, et dans toute l’Afrique francophone! C’est déjà énorme comme réservoir. En plus si je veux transmettre quelque chose d’aussi précis qu’un sentiment intérieur ou qu’une sensation, je suis beaucoup plus à l’aise avec ma langue natale.
MusiqueAlliance : Penses-tu qu’on puisse encore à notre époque conquérir un public international sans chanter en anglais ?
Rãgarãja : Oui comme je te disais il y a une possibilité. Mais la première priorité c’est toute la France. C’est assez riche comme territoire en terme de salles de concert, et d’asso qui se bougent pour essayer d’alimenter sans cesse la scène métal. Le Hellfest ca part d’un gamin de 16 ou 18 piges qui voulait organiser un festoche dans sa cambrousse et maintenant c’est une machine monstre. Faut croire dans notre pays un peu avant de vouloir absolument viser une carrière internationale. Surtout que l’internationale n’est pas tout rose. C’est assez lourd de se donner les moyens de faire des bonnes tournées etc. La scène métal actuelle est tellement surchargée de choses, que c’est dur de sortir du lot. Avec le français ça nous donne un argument de ce coté là pour se faire remarquer. Pour en revenir à l’internationale, notre objectif principal à l’étranger c’est le Québec et la Belgique. Le Québec est assez réactif à nos sollicitations en terme de médias, et du coup on compte s’organiser une petite tournée la bas.
MusiqueAlliance : Chanter la passion, c’est toujours mieux que la politique 🙂 Y a-t-il d’autres sujets que tu voudrais aborder à travers Rãgarãja ?
Rãgarãja : La nature humaine. C’est un peu ma trame en ce moment. La nature humaine dans notre société actuelle et ses conséquences. Je traite pas mal de l’homme par rapport aux autres en ce moment. Alors que le premier EP est plutôt tourné sur l’homme vis à vis de lui même. J’essaie de faire évoluer la chose. Du coup je traîne pas mal dans les transports en commun pour écrire. Ça remets les idées en place, ça permets d’ouvrir les yeux sur des gens burinés par l’existence. Je reste dans un vocabulaire assez lyrique avec beaucoup de poésie mais j’essaie de donner une touche de lucidité. Pour faire passer un message humain. Ça reste éloigné de la politique et du parti pris. Je donne pas de leçon, je préfère décrire, orienter, aux gens de voir les messages qui leur parlent.
MusiqueAlliance : As-tu une date de prévue pour la sortie d’un album ?
Rãgarãja : Aucune. Je pense que la notion de l’album est morte et enterrée avec le téléchargement. Les gens veulent du nouveau l’un après l’autre. Ils ne consomment bien souvent que 10% d’un album. C’est à dire le single et puis voilà. Les habitudes d’écoute et d’achat changent vite en ce moment. Je pense qu’on va tenir un rythme de diffusion d’un EP de 5 a 7 titres par an. Après tout va dépendre. On peut aussi très bien choisir de s’en foutre, et sortir un titre dès que ça nous chante. C’est une idée qui me plait pas mal d’ailleurs.
MusiqueAlliance : Pour finir est-ce que vous tournez en ce moment ? Ou alors des concerts, une tournée prévue,…. ? Bref, quels sont vos projets ?
Rãgarãja : En ce moment on dégote des dates tant qu’on peut, des résidences, des petites choses comme ça à droite à gauche! On essaie d’avance, on prépare des nouveaux titres, des nouveaux graphismes, peut être un nouveau clip. Pas de tournée pour le moment. Nos projets consistent avant tout à vouloir se produire un maximum sur scène.
Tous nos remerciements à Euryale Djentka pour avoir bien voulu répondre à nos questions. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de leur actualité. Trés prochainement ici-meme notre test de leur EP.
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