Hindi Zahra le 23 septembre 2015 à la Kulturfabrik (Esch/Alzette au Luxembourg)
Avec Handmade, son premier album écoulé à plus de 135 000 exemplaires, dont 75 000 en France, Hindi Zahra a fait plus de 300 concerts dans le monde pendant deux ans et demi. Jouer jusqu’à l’épuisement, tourner jusqu’à l’étourdissement, en quête d’une transe qui ne laisse pas indemne. Dès la fin de sa tournée, Hindi Zahra prend la décision de s’installer un an à Marrakech.
Seule, dans un riad de la médina, comme un cocon ouvert sur l’extérieur. Pour se reposer, et trouver le chemin de sa musique. « Une vraie descente dans la solitude… Pour digérer une histoire et la raconter, en tirer des chansons de transe, libérées. Parfois je faisais les courses pour deux semaines, et je ne sortais plus. » Parce qu’il est question de transe, elle commence par explorer des rythmes, avec Rhani Krija, un musicien d’Essaouira qui fait une carrière internationale. « Il est arrivé avec une camionnette remplie de percussions, qu’il a étalées dans le patio du riad. On
choisissait, on mélangeait : des rythmes cubains avec des percussions marocaines, des rythmes marocains avec des percussions indiennes… » La suite – la composition, les chansons, les arrangements – va naître sur ce tapis de percussions, tissé pendant près d’un an.
Comme dans l’immeuble musical de son enfance, Hindi Zahra connaît tous les étages. Elle passe du temps dans des grottes entre Essaouira et Agadir, puis va en haut des montagnes, avec les paysans berbères qui scrutent l’océan. Hindi Zahra sort de sa retraite, ses chansons l’appellent au large. A Cuba, en Jordanie, en Andalousie, en Egypte, en Italie. Ces voyages et ces expériences rencontrent des passions musicales tenaces (Miriam Makeba, Cesaria Evora, Marvin Gaye ou Nina Simone), et dessinent la route ascensionnelle de Homeland. Elle a terminé l’enregistrement de l’album à Paris, au bout d’une odyssée initiatique qui a duré deux ans et demi. Mais pour l’auditeur, ce n’est que le début du voyage.
Homeland s’écoute comme on feuillette un journal de bord, comme on remonte le cours d’une vie. Il y a quelque chose d’essentiel, d’élémentaire dans cet album : la chaleur du soleil, le bruit de l’océan, l’espace, des chansons qui se meuvent comme des marées ou des nuages. On reconnaît des styles musicaux, beaucoup de styles musicaux, mais ils ont oublié leur nom, tous fondus et portés par le tempo chaloupé et capiteux qui donne son cap à l’album. Des chansons d’aventurière qui, remontée des tréfonds, danse sur les flots et vogue sur les déserts. Il y a de la mélancolie dans les chansons d’Hindi Zahra, mais de l’extase dans sa voix, et des mélismes qui font le tour du monde en spirales. Une soul mondiale progressive, qui libère les corps et les coeurs en douceur, en profondeur.